Les dispositions réglementaires en matière d’intégrité dans les marchés publics
En plus de l’arsenal juridique prévu en matière d’intégrité, le décret n° 2-12-349 du 20 mars 2013 a consacré des dispositions réglementaires essentielles à respecter par les agents publics ainsi que ceux du privé (paragraphe1), et détermine des procédures à satisfaire (paragraphe2).
PARAGRAPHE1: Les dispositions relatives à l’intégrité dans les marchés publics.
En effet, l’article 168 du décret n° 2-12-349, mentionne clairement que :« Les intervenants dans les procédures de passation des marchés doivent tenir une indépendance vis-à-vis des concurrents et n’accepter de leur part aucun avantage ni gratification et doivent s’abstenir d’entretenir avec eux toute relation de nature à compromettre leur objectivité, leur impartialité et leur indépendance, les membres des commissions d’appels d’offres, des jurys de concours et des commissions des procédures négociées ainsi que des sous-commissions ou toute personne appelée à participer aux travaux desdits commissions ou jurys, sont tenus de ne pas intervenir directement ou indirectement dans la procédure de passation des marchés publics, dès qu’ils ont un intérêt, soit personnellement, soit par personne interposée auprès des concurrents, sous peine de nullité des travaux des commissions ou jurys précités»
Aussi le décret du 20 mars 2013 mentionne clairement l’obligation de réserve et le secret professionnel dont doivent faire preuve les agents en charge des marchés publics, des dispositions sont également prévues dans le Code pénal et le statut de la fonction publique ; a cet effet l’article 166 du décret n°2.12.349, stipule que: « Sans préjudice des dispositions législatives en vigueur concernant le secret professionnel, les membres des commissions d’appels d’offres, des jurys de concours et des commissions des procédures négociées ainsi que des sous-commissions sont tenus de garder le secret professionnel pour tout ce qui concerne les éléments portés à leur connaissance à l’occasion du déroulement des procédures prévues par le présent décret, il en est de même pour toute personne, fonctionnaire, expert ou technicien, appelée à participer aux travaux desdits commissions ou jurys», il en est de même pour l’article 167 stipule que: « Après l’ouverture des plis en séance publique pour toutes les procédures prévues au présent décret, aucun renseignement concernant l’examen des offres, les précisions demandées, l’évaluation des offres ou les recommandations relatives à l’attribution du marché ne doit être communiqué ni aux concurrents ni à toute autre personne n’ayant pas qualité pour participer à la procédure tant que les résultats d’examen des offres n’ont pas été affichés dans les locaux du maître d’ouvrage».
Le statut général de la fonction publique indique: « Indépendamment des règles instituées dans le Code pénal en matière de secret professionnel, tout fonctionnaire est lié par l’obligation de discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les faits et informations dont il a connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, tout détournement, toute communication contraire au règlement de pièces ou documents de service à des tiers sont formellement interdits. En dehors des cas prévus par les règles en vigueur, seule l’autorité du ministre dont dépend le fonctionnaire peut délier celui-ci de cette obligation de discrétion ou le relever de l’interdiction édictée ci-dessous».[1]
En trouve aussi dans le Code pénal que l’article 446 réclame que: « Les médecins, chirurgiens ou officiers de santé, ainsi que les pharmaciens, les sages-femmes ou toutes autres personnes dépositaires, par état ou profession ou par fonctions permanentes ou temporaires, des secrets qu’on leur confie, qui hors le cas où la loi les oblige ou les autorise à se porter dénonciateurs, ont révélé ces secrets, sont punis de l’emprisonnement d’un mois à six mois et d’une amende de mille deux cents à vingt mille dirhams. Toutefois, les personnes énumérées ci-dessus n’encourent pas les peines prévues à l’alinéa précédent :
1. Lorsque, sans y être tenues, elles dénoncent les avortements dont elles ont eu connaissance à l’occasion de l’exercice de leur profession ou de leurs fonctions ;
2. Lorsqu’elles dénoncent aux autorités judiciaires ou administratives compétentes les faits délictueux et les actes de mauvais traitement ou de privations perpétrés contre des enfants de moins de dix-huit ans ou par l’un des époux contre l’autre ou contre une femme et dont elles ont eu connaissance à l’occasion de l’exercice de leur profession ou de leurs fonctions ». Les agents publics en charge des marchés publics ne sont pas les seuls acteurs à devoir faire preuve d’intégrité dans le processus de passation des marchés publics, le secteur privé a également une responsabilité claire à jouer dans ce domaine. Les marchés publics doivent contenir des garanties « anticorruption » et des mesures afin de s’assurer que les fournisseurs n’ont pas eu, et n’auront pas recours à des actes de corruption dans le cadre du contrat de marché public.
En effet L’article 26, du décret n°2.12.349, stipule que: « chaque soumissionnaire doit soumettre une déclaration sur l’honneur l’engageant à ne pas recourir par lui-même ou par personne interposée à des pratiques de fraude ou de corruption des personnes qui interviennent, à quelque titre que ce soit, dans les différentes procédures de passation, de gestion et d’exécution des marchés».
PARAGRAPHE2: Les procédures d’intégrité relatives aux marchés publics
Une définition très précise des besoins dans les documents d’appel d’offres n’est pas uniquement une exigence juridique, mais également une condition impérative pour que l’achat soit effectué dans les meilleures conditions.
Selon les termes de l’article 5 du décret n° 2-12-349 du 20 mars 2013, les prestations qui font l’objet des marchés doivent répondre exclusivement à la nature et à l’étendue des besoins à satisfaire, le maître d’ouvrage est tenu, avant tout appel à la concurrence ou toute négociation, de déterminer aussi exactement que possible les besoins à satisfaire, les spécifications techniques et le contenu des prestations, la détermination des besoins doit être définie par référence à des normes marocaines homologuées ou à défaut, à des normes internationales, les spécifications techniques doivent être basées sur des caractéristiques portant notamment sur la performance, la capacité et la qualité requises, les spécifications techniques ne doivent pas mentionner de marque commerciale, de références au catalogue, appellation, brevet, conception, type, origine ou producteurs particuliers, à moins qu’il n’y ait aucun autre moyen suffisamment précis et intelligible de décrire les caractéristiques des prestations requises et à condition que l’appellation utilisée soit suivie des termes « ou son équivalent », dans ce cas, si une telle référence est mentionnée, elle inclut les prestations ayant des caractéristiques équivalentes et qui présentent une performance et qualité au moins égales à celles qui sont exigées.
La définition des spécifications techniques ne doit pas avoir pour effet de créer des obstacles au libre jeu de la concurrence, si le concurrent propose une marque répondant aux spécifications techniques exigées par le maître d’ouvrage, cette marque doit être mentionnée dans le marché, le maître d’ouvrage établit, avant tout appel à la concurrence ou toute négociation, une estimation des coûts des prestations à réaliser sur la base de la définition et du contenu des prestations objet du marché et des prix pratiqués sur le marché en tenant compte de toutes les considérations et sujétions concernant notamment les conditions et le délai d’exécution, l’estimation est établie sur la base des différents prix contenus, selon le cas, dans le bordereau des prix-détail estimatif, le bordereau des prix, le détail estimatif, le bordereau du prix global. Le montant total de l’estimation s’entend toutes taxes comprises. Elle est consignée sur un support écrit et signé par le maître d’ouvrage, lorsque le marché est alloti, le maître d’ouvrage établit une estimation pour chaque lot.
L’article 9 du décret relatif aux marchés publics érige l’allotissement en principe pour susciter la plus large concurrence entre les entreprises et leur permettre, quelle que soit leur taille, d’accéder à la commande publique, bien qu’il n’y ait pas d’obligation d’allotissement dans un marché global, il est tout de même opportun que tous les marchés soient passés en lots séparés lorsque leur objet permet l’identification de prestations distinctes, l’allotissement est particulièrement approprié lorsque l’importance des travaux, fournitures ou services à réaliser risque de dépasser les capacités techniques ou financières d’une seule entreprise. Il est particulièrement favorable aux petites et moyennes entreprises et aux très petites entreprises, aussi le maître d’ouvrage choisit entre un marché unique ou un marché alloti en fonction des avantages financiers ou techniques qu’ils procurent ou lorsque l’allotissement est de nature à encourager la participation des petites et moyennes entreprises.
Concernant la mise en œuvre des procédures, Les mesures de publicité et de mise en concurrence assurent le respect des principes rappelés à l’article 1 du décret relatif aux marchés publics: « liberté d’accès à la commande publique, égalité de traitement des concurrents, garantie des droits des concurrents et transparence dans les choix du maître d’ouvrage », la publicité présente une double utilité:
1. Elle permet le libre accès à la commande publique de l’ensemble des prestataires intéressés en informant les secteurs économiques concernés du lancement d’une procédure d’achat.
2. Elle suscite une plus grande diversité des offres, elle permet d’accroître les chances d’obtenir l’offre économiquement la plus avantageuse et de garantir un bon usage des deniers publics.
La publicité concerne à minima la publication des programmes prévisionnels des achats et l’insertion de l’avis de publicité sur 2 journaux à diffusion nationale dont l’un en langue arabe et l’autre en langue étrangère et sur le portail des marchés publics.
Selon les termes de l’article 14 du décret relatif aux marchés publics, le maître d’ouvrage est tenu de publier au début de chaque année budgétaire et au plus tard avant la fin du premier trimestre, dans un journal à diffusion nationale au moins et dans le portail des marchés publics, le programme prévisionnel des marchés qu’il compte passer au titre de l’année considérée. Il peut également procéder à sa publication par tout autre moyen de publication notamment par voie électronique.
Le maître d’ouvrage doit afficher le programme prévisionnel des marchés dans ses locaux pendant une durée de trente (30) jours au moins.
Des programmes prévisionnels modificatifs ou complémentaires peuvent être publiés ultérieurement à cette date, en cas de besoin dans les conditions prévues ci-dessus.
Le programme prévisionnel doit contenir notamment :
• l’indication de l’objet de l’appel à la concurrence ;
• la nature de la prestation ;
• le lieu d’exécution ;
• le mode de passation envisagé ;
• la période prévisionnelle de la publication de l’avis d’appel à la concurrence des marchés que le maître d’ouvrage envisage de lancer au titre de l’année budgétaire considérée.
Le décret n° 2-12-349 relatif aux marchés publics encadre aussi le recours aux principales modèles de passation des marchés publics.